LE RETOUR DES GRANDS PREDATEURS
Conférence du MHNR le 25.03 .2010 par
B. BACHASSON, professeur au Lycée Agricole de Poisy.
Le LOUP :
Il chasse à courre ! Les loups italiens (20-30kg) sont de taille modeste par rapport aux loups du Nord : leur robe a des rayures noires (voir l’individu
au Musée de Gruffy).
Sa trace est droite (contrairement au chien qui zigzague) et la meute marche dans les pas du précédent : à la queue leu leu ! L’empreinte du pas
est de 90 à 130cm de long, alors que la patte laisse une trace assez ronde de 7-11cm. Mais la seule confirmation sûre de la présence du loup ne peut se faire que par
l’analyse ADN : par prélèvements sur les cadavres (victimes), poils et urine, crottes qui contiennent poils et os broyés et cellules épithéliales. Ces analyses se font
dans le laboratoire de la police scientifique de Grenoble : ainsi, tous les loups en France sont génotypés (alors qu’en Italie, les loups de parcs ne sont même pas munis de puces).
Les caractéristiques du loup sont multiples : il est discret, craintif, intelligent ; très résistant au jeûne, adaptable et, par-dessus tout, très
mobile : il lui faut un territoire de 15000 hectares qu’il parcourt sans cesse.
Il est très organisé et hiér archisé dans la meute de 4/5 (max. 9) loups : 1 mâle et 1 femelle dominants : les autres femelles sont
en latence et les jeunes mâles entreprenants sont exclus. Les loups solitaires sont ceux qui ne sont pas acceptés par la meute non seulement pour des problèmes de dominance mais aussi par
incompatibilité caractérielle- apparemment le loup a une « caboche » ! Il mange de tout, est omnivore.
Si en 1992, les loups ont été vus dans les forêts et pâturages de haute altitude, après 2000, ils sont descendus plus bas. La caractéristique fondamentale du loup
est son ubiquité et sa trajectoire (loups italiens) le pousse de Belledonne vers le Jura, et du Vercors dans le Massif central (2 loups sur l’Aubrac en 2000) : il traverse
même les autoroutes et se fait ainsi écraser. Dans les Pyrénées on signale la présence de 4 individus venus d’Italie. En 2009, grâce à l’ADN, on a dénombré 180 loups en France entière –il peut
très bien vivre en plaine.
L’attaque d’ovins est un signe –non suffisant- de la présence du loup.
Pour un potentiel de 25%, l’accroissement de la population de loups est en fait de 7,5% an et on dénombre 26 zones de présence permanente (ZPP),
soit 19 meutes dont 12 ont été reproductrices en 2008.
Quel est son rôle dans l’écosystème ?
super prédateur : in ne supporte pas de chien errant sur son territoire
sélectionneur/ éradicateur efficace, il chasse à courre et sa présence fait des animaux plus sains
indicateur de richesse faunistique, par exemple, durant la 2° Guerre Mondiale il n’y avait plus d’ongulés, il n’y avait plus de loups aussi.
La problématique actuelle du loup :
en 2004, la 1° louve dans les Glières a posé un problème grave car les éleveurs avaient des petits troupeaux d’ovins, et donc moins capables de se protéger de ses
attaques. Selon les études faites, pour 8 millions (8.000.000) d’ovins, 5.00.000 sont perdus (toutes causes confondues). Si 200 à 300 ovins/an sont indemnisés « loup », il reste la
question des dégâts collatéraux : quid
des dérochements (animaux qui se précipitent du haut des rocher ?
des avortements spontanés ?
de la tension nerveuse des animaux, qui croissent moins bien ?
En Haute Savoie, 15 éleveurs sont concernés et en particulier au Col de la Buffaz, où une louve pleine a été
abattue après des ravages (il reste le problème du remplacement du gardien qui n’est pas revenu). (Au passage, il est bon de noter l’incidence négative du surpâturage du
mouton, bon débroussailleur, il entraîne la diminution de la flore et de la faune et de la superficie forestière, la main de l’homme y contribue aussi !)
L’utilisation du Patou, dont l’efficacité est renforcée par la clôture, limite le nombre des pertes, non celle des attaques (effets collatéraux restent..).
Le Patou entraîne aussi des frictions avec les randonneurs qui devraient faire un détour pour éviter les troupeaux- est-ce toujours possible ?
Il reste le comportement imprévisible des louvards – jeunes loups inexpérimentés...
Ainsi le territoire Glières-Aravis-Bargy voit la présence de 5 à 6 loups et Champ Laitier est devenu en 2006 une ZPP, où en 2008 une meute de 1 mâle, 1 femelle et
2-3 jeunes est installée.
Le loup n’aime pas les reliefs rocheux escarpés (zone de fuite pour les ongulés).
Après que le loup a mangé, surviennent le renard, d’autres petits préd ateurs, enfin le gypaète barbu, casseur d’os
A la fin, il ne reste plus sur place que les poils (et crottes) de la victime.
1 loup =
50 proies =
1000 ongulés.
En résumé, le loup limite les effectifs des ongulés,
les disperse sur tout son territoire
élimine les chiens errants
Mais sa présence perturbe grandement la pâture des ovins, ressource économique, elle-même sous la pression des importations de viande ovine (carcasses congelées de
N.Zélande).
La grande question : trouver un équilibre avec les chasseurs et les éleveurs ?
Pour 1 loup tué en pays de Gex (probablement un loup chassé par la meute) ,3 ou 4 loups ont été tirés, sur le 7/8 loups, au départ. Entre le
braconnage, et les plans de chasse (200, puis 1000, éventuellement 2000 ?) il n’y a pas de risque de prolifération du loup.
Si le loup résiste aux conditions climatiques, résistera-t-il au plus grand des prédateurs, l’homme ?
Le loup fait partie d’une chaîne alimentaire qui se termine avec lui. Le plus gros risque pour lui et les autres animaux reste l’empoisonnement.
En Slovaquie (1 loup = 10 cerfs) il existe des plans de chasse et du tir légal := 6 loups /an
A la fin de la conférence, 2 tableaux projetés, résument fort bien les avantages et les inconvénients de la présence du loup. Certains auditeurs, tout en
reconnaissant l’effort d’impartialité et d’une présentation aussi complète que possible de tous les aspects de la question, ne semblent guère convaincus et restent hostiles à la présence du loup
, dont ils ne voient guère l’intérêt même touristique puisqu’il est très difficile de le voir, de l’approcher......