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Le Chéran I

Publié le par Entre Semnoz et Chéran

Le Chéran est qualifié de «Rivière précieuse» par le poète Henri Travers, une personnalité de Gruffy.

 

Pour faire écho à l'exposition qui se trouve au Musée de Gruffy en ce moment, explorons avec Jean cette belle rivière....


"Rivière française, affluent du Fier, longue de 50 Km(1)", le Chéran prend sa source dans les Bauges, sur le versant sud de la pointe de Chaurionde, vers 1500m d’altitude.  La Pointe de Chaurionde culmine à 2168m d'alitude, sur la commune de Clery, Savoie.

 

 Pointe Chaurionde [1024x768] 

Il draine un bassin versant de 433 km² pour se jeter dans le Fier en aval de Rumilly. Savoyard dans sa partie supérieure, il devient Haut Savoyard vers le Pont de Bange, ne servant de limite entre les départements que sur une courte distance (jusqu’au pont de l’Eau Morte).


Plus un élément d’union que séparateur, il est, à sa manière, un symbole du PNR du Massif des Bauges.

Elément fédérateur, il incarne aussi ce travail en commun des Pays de Savoie par l’intermédiaire du Syndicat Mixte Interdépartemental pour la Sauvegarde du Chéranen un mot le SMIAC !

P9130031--1024x768--copie-1.JPG

 


Etymologie :


 «Chéran» viendrait de ‘Cara’, forme féminine de ‘Carus’, ancien nom de plusieurs rivières – entre autre le Cher. Cara –Caran- devenu Cheran  par suite de la déclinaison germanique, d’un usage fréquent pour les noms de rivières. Il a un Homonyme : le Chéran, rivière de la Mayenne (2). 

Ernest Nègre (3), propose la «racine préceltique hydronymique ‘KAR’, qui pourrait signifier "gros gravier dans le lit des rivières".

Quelques citations :  

                 aqua que dicitur Cara (1288),

                 aqua de cheran (1435)

                 super aquam Care se Cheran (1444)

 

Hydrologie :


Les plus hauts sommets des Bauges entourent sa source (Arcalod, Trélod sur sa rive droite ; Péclod, Arclusaz sur sa rive gauche) et son premier cours (N.E.–S.O.) est celui d’un torrent de montagne, tout au long du vallon de Bellevaux.

 

P9130001 [1024x768]

 


Puis vers Ecole en Bauges, le Chéran change de direction du S.E. vers le N.O., pour desservir deux plaines alluviales –à la pente moins raide- de la Compote (Bauges ‘devant’) et celle de Lescheraines (Bauges ‘derrière’)

P9130016 [1024x768]

 


C’est par le canyon du Pont de l’Abîme que le Chéran sort de son basin supérieur : ce canyon profond de 93m et aux parois parallèles est la cluse entre la Montagne de Bange et le Semnoz.

P9130023 [1024x768]

 


Entre Gruffy-Cusy et Marigny –St Marcel son cours devient plus étroit entre des falaises calcaire dominantes et il prend de la vitesse.

En aval, après Alby/Chéran, le Chéran a un cours moins rectiligne à travers la dépression molassique de l’Albanais, pour rejoindre le Fier (confluence en aval du Rumilly (308m alt.)

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En dépit des nombreuses infiltrations dans le calcaire karstique (courants souterrains nombreux –cf. grottes de Prerouge ) il reçoit près de 18 ruisseaux et nants.

Il se caractérise par des crues violentes, fonte des neiges et pluies.

Il traverse 18 communes.

 

                                                Texte et photos de Jean

à suivre..................

 

 

(1)  Dictionnaire Encyclopédique des Alpes, Ed GLENAT, 2006

(2) Dictionnaire Etymologique des noms de lieu de la Savoie, Adolphe Gros, Ed. La Fontaine de Siloé 2004.

(3) Toponymie Générale de la France, Genève, Librairie Droz, 1990.



[1]  Dictionnaire Encyclopédique des Alpes, Ed GLENAT, 2006

Publié dans Histoire et légendes

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Première sortie

Publié le par Entre Semnoz et Chéran

 

 

Première sortie du groupe nature de Gruffy


Ils ont choisi Brison, ce sont des fidèles !


Découverte de nombreuses fleurs ou de feuilles seulement, on voit que tout le monde attend la pluie pour grossir.


Le micrope dressé, Micropus erectus, rare et modeste et protégé. Il porte aussi le nom poétique de Bombycillaena erecta.

Micropus erectus

 

Parcours dans les vigne de Brison

groupe 01w


Ce sont tous les détails que Sylvie nous permet de découvrir, l'écorse liegeuse de l'érable champêtre par exemple :


érable champêtre

 

 

groupe 02w

Découverte d’insectes aussi, grace à Monique et Claudie. Quelques belles photos d’André :

L'abeille charpentière, Xylocope violacae,Abeille charpentière

 

Le flambé, Iphiclides podalirius

 

 

Flambé 01


Claudie nous fait suivre les pierides dans leur déambulation, ce sont des femelles et elles pondent! Jacques était là!oeuf de pierride

 

et aussi l'Aurore, Anthocaris cardamines, c'est aussi une femelle et elle laisse un petit oeuf sur une arabette tourette. Là, c'est Monique qui photographie!

Maman


Aurore Anthocaris cardamines femelle (2)

Papa

Aurore mâleBébé

 

Oeuf Anthocaris cardamines sur Arabis turita (2)

 

Un crache sang,  Timarcha tenebricosa

  crache sang 

 

 


groupe 03w

 

Quel beau panorama!

 groupe 04w                      

                                               Belle, belle journée....... Christianne


 

Merci à Monique et à sa sœur Claudie, pour leurs infos éclairées, notamment, sur les insectes.

 

Merci à Sylvie pour ses connaissances et sa patience et à Christianne pour sa prise de notes. Merci aussi à vous tous pour votre bonne humeur. L'implication de chacun a contribué à faire de la première sortie de la saison, une journée conviviale et bien agréable.  

                                                                                                                                                                                                                                                    Joanny


Le reste des photos dans l'album "2012, mars BRISON"


Publié dans Sorties

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La pervenche et Jean Jacques Rousseau !

Publié le par Entre Semnoz et Chéran

LA PERVENCHE (Vinca Minor)

img001Depuis la fin de l’été 1731, Mme de Warens se trouve à Chambéry  (après l’abdication de Victor-Amédée II en 1730 en faveur de son fils Charles Emmanuel), plus près de la cour du roi de Sardaigne et de la source de ses revenus : son action de prosélytisme en faveur de la religion catholique est financée par la maison de Savoie. Elle y loue un petit hôtel appartenant au comte de Saint- Laurent, chargé des finances du royaume !!

« La maison qu’elle occupait était sombre et triste et ma chambre était la plus triste et la plus sombre de la maison. Un mur pour vue, un cul-de- sac pour rue, peu d’air, peu de jour, peu d’espace, des grillons, des rats, des planches pourries, tout cela ne faisait pas une plaisante habitation. »
Les Confessions, livre 5ième.

Pas étonnant donc, que Mme de Warens donne suite au projet  « de retraite » (suggéré par JJR) et que dès 1735,

«Après avoir un peu cherché, nous nous fixâmes aux Charmettes », «un  réduit assez loin de la ville pour vivre en paix et assez près pour y revenir toutes les fois qu’il sera nécessaire ».

 

Les Charmettes


2011 29.09 (1) [1024x768]Le livre 6ème s’ouvre sur des citations allant toutes dans le même sens, qu’il reprend dans une phrase -  oh ! Combien connue :

« Ici commence le court bonheur de ma vie ».

 «Le premier jour que nous allâmes coucher aux Charmettes, Maman était en chaise à porteurs et je la suivais à pied. Le chemin monte, elle était assez pesante, et craignant de trop fatiguer ses porteurs, elle voulut descendre à peu près à moitié chemin pour faire le reste à pied. En marchant elle vit quelque chose de bleu dans la haie et me dit : « voilà de la pervenche » je ne me baissai pas pour l’examiner car j’ai la vue trop courte pour distinguer à terre les plantes de ma hauteur.
Je jetai seulement en passant un coup d’œil sur celle-là, et près de trente ans se sont passés sans que j’aie revu de la pervenche ou que j’y aie fait attention.

 

 Les Charmettes

IMGP0100 [1024x768]

 

En 1764 étant à Cressier avec mon ami M. Du Peyrou, nous montions une petite montagne au sommet de laquelle il a un joli salon qu’il appelle avec raison Bellevue. Je commençais à herboriser un peu. En montant et regardant parmi les buissons je pousse un cri de joie : Ah voilà de la pervenche ; et c’en était en effet. Du Peyrou s’aperçut du transport, mais il en ignorait la cause ; il l’apprendra, je l’espère, lorsqu’un jour il lira ceci ».

C’est aux Charmettes qu’il se fera «son magasin d’idées, vraies ou fausses » en autodidacte, manière d’apprendre dont il sera l’ardent défenseur tout au long de sa vie ; mais il y trouvera un réel contact avec la nature, travaillant au jardin ou dans la vigne :


Le jardin des Charmettes

2011 29.09 (13) [1024x768]


«Je me levais tous les matins avant le soleil. Je montais par un verger voisin dans un très joli chemin qui était au-dessus de la vigne, et suivait la côte jusqu’à Chambéry. [...] Je revenais en me promenant par un assez grand tour, occupé à considérer avec intérêt et volupté les objets champêtres dont j’étais environné, les seuls dont l’oeil et le cœur ne se lassent jamais».

 

Le jardin des Charmettes


2011 29.09 (12) [1024x768]Si la rédaction des Confessions fut souvent interrompue, on estime que la première partie fut rédigée entre 1764 et 1767, ce passage sur Vinca minor correspond  à son séjour à Môtiers en 1762 dans une maison mise à sa disposition par Mme Boy de la Tour1, et où il herborise en compagnie de son ami Du Peyrou, fidèle entre les fidèles en dépit de la brouille entre les deux hommes (mais avec qui JJR ne s’est-il pas fâché  !).


vinca minor
On y voit apparaître une fonction majeure de la flore pour JJR, la fonction mémorative de la plante qui lui rappelle tout un flot de souvenirs, un état d’âme du passé qui surgit dans la conscience du moment actuel ; il revit un moment antérieur (le plus souvent heureux) tel qu’il fut vécu ; bien plus tard Proust (et sa madeleine) y ajoutera une tentative de comprendre l’essence du temps – ce qui n’est pas le cas de JJR ! Mais on peut dire, ici, que la pervenche est la ‘madeleine-de-Proust’ de JJR !



                                                           Jean


Photos Yvette


1 : on reparlera bientôt de Mme Boy de la Tour !


 

 

 


Publié dans Histoire et légendes

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La pervenche

Publié le par Entre Semnoz et Chéran

Elle est en fleur partout en ce moment, elle a ouvert la "conscience botanique" de J.J.R. c'est la "petite pervenche ".


Vinca minor est une plante vivace de la famille des Apocynacées, c’est la seule représentante de cette famille en pays de Savoie où elle est très commune. Selon les régions, elle est appelée violette des morts, violette des sorciers voir même violette des serpents...

 

Vinca minor 1

Etymologie
L’étymologie du mot pervenche est très controversée :

Pour les uns il viendrait du latin "vinca pervinca", une formule crée à partir de "vincere" (vaincre). En effet, la pervenche aurait des vertus médicinales permettant de vaincre de nombreux maux ou encore "vincere" pourrait traduire sa capacité à résister au froid : les feuilles restent vertes en hiver.
Pour les autres, le nom de pervenche viendrait de "vincire", lier, attacher, car cette plante dont les horticulteurs font des bordures, s'étend comme une corde.

 

Vinca minor 2


Au printemps, la petite pervenche forme des tapis bleus sur fond vert luisant, qui s’étalent en lisière et en sous-bois, sur sols bruns riches en litière de décomposition. On les trouve en particulier le long des ruisseaux encore gonflés à cette saison, mais aussi le long des chemins bordés de haies.
En zone européenne tempérée, elle serait un bio indicateur qui signale qu'une parcelle a été autrefois cultivée, éventuellement plusieurs siècles ou millénaires auparavant. Elle renseigne donc sur la naturalité des forêts.

Vinca major


Description selon la "flore descriptive et illustrée" de l’abbé H.Coste.
 Plante vivace, glabre, couchée-diffuse, à tiges persistantes, longues de 1-2 mètres,
•    feuilles coriaces, luisantes, ovales-elliptiques, rétrécies aux deux bouts, très glabres,
•    tiges florifères dressées, longues de 10-20 cm., peu feuillées,
•    fleurs bleues ou violacées, solitaires sur des pédoncules plus courts ou plus longs que les feuilles et la corolle,
•   calice à lobes lancéolés-linéaires, obtus, glabres, longs de 2-4 mm. et 2-3 fois plus courts que le tube de la corolle,
•    Corolle large d'environ 3 cm. à lobes obovales en coin, tronqués au sommet.


Vinca minor planche


Histoire
La pervenche était déjà connue au 1er siècle pour ses vertus astringentes et au Moyen-âge elle entrait dans la composition de certains philtres aux formules magiques. Elle était considérée comme un symbole d’immortalité. Après en avoir jeté des tiges dans le foyer, on prononçait certaines invocations ou formules propres à attirer les âmes des trépassées, les volutes de la fumée faisaient alors apparaître les figures des êtres chers.

La pervenche entrait aussi tout naturellement dans les philtres d’amour, pour redonner vigueur aux liaisons rompues et faire revenir les amants volages.        

   

vinca minor                                                 

 

En Italie on tressait ses tiges souples en couronnes pour les poser sur la tombe des enfants.

En Flandre on parsemait de fleurs et de feuilles, le chemin suivi par les futurs mariés pour se rendre à l’église. Le bleu des fleurs symbolisant l'innocence de la fiancée et les feuilles la pérennité des sentiments amoureux.


Avant même que ses propriétés pharmacologiques soient établies, la tradition considérait la pervenche comme capable d’arrêter les hémorragies : «Elle étanche le sang de quelque part qu’il coule», affirmaient les auteurs anciens, tandis qu’on l’employait dans les campagnes pour arrêter le flux menstruel et empêcher les avortements si on la portait attachée autour de la cuisse.        

                    
La pervenche a été naturalisée dans les îles britanniques, en Scandinavie et en Turquie. Elle est cultivée en Hongrie et en Pologne pour ses propriétés de vasodilatateur. 


La pervenche et la littérature
Cette plante a inspiré Jean-Jacques Rousseau et a séduit de nombreux poètes, y compris Lamartine et Georges Brassens.

 

Grille de la petite fontaine dédiée à J.J.R., à Annecy

 

Vinca minor 4

Vinca monor 3

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Elle était déjà conseillée au XVII ème siècle par Mme de Sévigné ! En 1684, elle écrivait à sa fille, Mme Grignan :
"Enfin, ma bonne, quoi qu'il en soit, consolez vous et guérissez-vous avec votre bonne pervenche, bien verte et bien amère, mais bien spécifique à vos maux et dont vous avez senti de grands effets, rafraîchissez-en cette poitrine enflammée."


Utilisation
Plante astringente, diurétique, dépurative, tonique et vulnéraire, elle doit toutefois être utilisée avec prudence car elle est soupçonnée  d’être cancérigène.                                          

La feuille de la petite pervenche contient essentiellement des alcaloïdes indoliques et tout particulièrement de la vincamine à l'origine de son action sur la circulation cérébrale.

 
Cependant, sachez que -suite à l'article 8 du Décret n° 2006-352 du 20 mars 2006 relatif aux compléments alimentaires- la petite pervenche n'est plus autorisée actuellement à la vente sur le territoire français !  

                                         

                                                                       Joanny

   


Photos Mireille, Christianne et "empruntées" à Internet

 


Publié dans Fiches techniques

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JEAN JACQUES ROUSSEAU ET L’ARGOUSIER ou l'épisode de Grenoble.

Publié le par Entre Semnoz et Chéran

JEAN JACQUES ROUSSEAU ET L’ARGOUSIER (Hyppophae rhamnoides)
 

Jean-Jacques ROUSSEAU 1712-1778
Cette année, Savoyards et Suisses fêtent le tricentenaire de la naissance du célèbre genevois.
Notre propos n’est pas d’étudier la vie et l’œuvre de l’illustre philosophe mais d’approcher un aspect parfois méconnu de sa personnalité, son amour pour la botanique.

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 Joanny nous a parlé de l’argousier la semaine dernière, Jean Jacques Rousseau connaissait l'arbuste, Jean a fait de belles lectures pour nous :


Extrait des Confessions


«La botanique, telle que je l’ai toujours considérée, et telle qu’elle commençait à devenir une passion pour moi, était précisément une étude oiseuse, propre à remplir tout le vide de mes loisirs sans y laisser place au délire de l’imagination.. » « Prendre machinalement çà et là tantôt une fleur, tantôt un rameau, [...] était de quoi passer l’éternité sans pouvoir m’ennuyer un moment. Quelque élégante, quelque admirable, quelque diverse que soit la structure des végétaux, elle ne frappe pas assez l’œil ignorant pour intéresser. Cette constante analogie, et pourtant cette variété prodigieuse qui règne dans leur organisation, ne transporte que ceux qui ont déjà quelque idée du système végétal ».

 

La fontaine de Jean-Jacques Rousseau à Annecy, nous vous reparlerons des petites fleurs de la grille.


 0164 Annecy 10 03 2011 MPG [1024x768]

Dans la 7ème Promenade des Rêveries du Promeneur solitaire, Rousseau écrit :

 « Durant mon séjour à Grenoble je faisais souvent de petites herborisations hors de la ville avec le sieur Bovier, avocat de ce pays-là ; non pas qu’il aimât ni sût la botanique, mais parce que s’étant fait mon garde de la manche (= garde de corps), il se faisait autant que la chose était possible une loi de ne pas me quitter d’un pas. Un jour nous nous promenions le long de l’Isère * dans un lieu tout plein de saules épineux. Je vis sur ces arbrisseaux des fruits mûrs, j’eus la curiosité d’en goûter et leur trouvant une petite acidité très agréable, je me mis à manger de ces grains pour me rafraîchir : le sieur Bovier se tenait à côté de moi sans m’imiter et sans rien faire. Un de ses amis survint, qui me voyant picorer ces grains me dit : « Eh ! Monsieur, que faîtes vous là ? Ignorez vous que ce fruit empoisonne ? – Ce fruit empoisonne ? m’écriai-je tout surpris –Sans doute, reprit-il ; et tout le monde sait si bien cela que personne dans le pays ne s’avise d’en goûter». Je regardai le sieur Bovier et je  lui dis : « Pourquoi donc ne m’avertissiez vous pas ? –Ah, monsieur, me répondit-il d’un ton respectueux, je n’osais pas prendre cette liberté».  Je me mis à rire de cette humilité dauphinoise, en discontinuant néanmoins ma petite collation.

 

Argousier 1

 

J’étais persuadé, comme je le suis encore, que toute production naturelle agréable au goût ne peut être nuisible au corps ou ne l’est du moins que par son excès. Cependant j’avoue que je m’écoutai un peu tout le reste de la journée : mais j’en fut quitte pour un peu d’inquiétude ; je soupai très bien, dormis mieux, et me levai le matin en parfaite santé, après avoir avalé la veille quinze ou vingt grains de ce terrible hippophaé, qui empoisonne à très petite dose, à ce que tout le monde me dit à Grenoble le lendemain. Cette aventure me parut si plaisante que je me la rappelle jamais sans rire de la singulière discrétion de M. l’avocat Bovier ».


Les fleurs de l'argousier sont apétales : peu de photographies.


Hippophae rhamnoides female flowers
Entre le 11 juillet et le 12 août 1768, Jean Jacques Rousseau séjourne à Grenoble, reçu par l’avocat Gaspard Bovier, et habite un « logement fort petit, fort laid»** rue des Vieux Jésuites – actuellement Rue Jean-Jacques Rousseau, au n° 2, au coin de la Place Sainte Claire. Il s’y sentira vite mal à l’aise, surveillé par tous : voici ce que lui écrit le prince de Conti : « Je sais que le lieutenant de police de Grenoble vous fait pour ainsi dire garder à vue »*** .

Les Rêveries.... furent écrites lors du dernier séjour de JJR à Paris, rue Plâtrière, entre 1776 et avril 1778

 

                                                                                                           Jean


Notes :
         * le long de l’Isère : en fait le Drac sur l’actuelle commune de Seyssinet – il y est un sentier pédestre, tracé en souvenir de JJR.
       ** dans Dictionnaire de Jean-Jacques Rousseau  (R. Trousson et F S. Eigeldinger), éd. Champion Classiques, 2006
         *** ibidem
 
Les baies de l’argousier sont comestibles et même savoureuses et surtout elles sont riches en vitamine C, mais nous déconseillons la méthode de JJR pour tester la toxicité des plantes ! 

 
Photos Marie Paule, Christianne et empruntée à internet                                                                                                 

 

Publié dans Histoire et légendes

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