La Montagne des Princes
Nous vous avons parlé du Vuache (en 2011) plus connu dans la région pour sa faille et son tunnel que pour sa végétation, aujourd’hui un autre massif nous intéresse : la Montagne des Princes. Ces deux massifs limités en hauteur n’ont pas les faveurs des excellents marcheurs attirés par de grandes dénivelées et les sommets mythiques des Alpes mais, pour nous les « petits » marcheurs, ces massifs de l’avant pays savoyard ont un charme fou et sont pleins de beautés accessibles.
La Montagne des Princes, le Gros Foug, la Montagne de Cessens et le Corsuet
Ce massif dépasse quelque peu les 1000 m d’altitude ; il est géologiquement rattaché au massif jurassien. Sa crête est armée par les strates de calcaires urgoniens, tandis que le cœur érodé de l'«anticlinal de la Chambotte » apparaît sur son versant ouest.
Dominant à l’ouest la vallée du haut-Rhône et le lac du Bourget, il disparaît au nord sous la couverture molassique, et s’interrompt au sud au-dessus d’Aix les Bains.
Entre la Montagne des Princes et le Gros Foug1, le trait de scie des Gorges du Fier constitue un exemple célèbre de « relief antécédent ».
Relief antécédent : La vallée en gorge, est entaillée dans un relief dont la surrection2 est postérieure à l'établissement du fleuve. En d'autres termes, la gorge du Fier entre le Gros Foug et la Montagne des Princes est antérieure au soulèvement qui a produit ces deux montagnes.
Le massif est couvert principalement de boisements feuillus (ils ont parfois fait l’objet d’enrésinements3 étendus), et ne conserve plus que de rares pâturages.
Une barre rocheuse précédée d’éboulis, très bien exposée, se développe sur le flanc ouest du plissement. Au sein d’une végétation à dominante collinéenne et montagnarde, elle favorise le développement de «colonies méridionales», avant-postes d’espèces méditerranéennes. Les environs de Brison Saint Innocent, bénéficiant d’un microclimat d’abri exceptionnel, sont à cet égard éloquents. Nous vous en reparlerons bientôt.
Depuis la crête de la Montagne des Princes, le Grand Colombier.
L’ensemble présente un intérêt ornithologique élevé, compte tenu de son intérêt pour les espèces rupicoles (Grand-duc d’Europe, Faucon pèlerin, Hirondelle de rochers, Martinet à ventre blanc…) et abrite des colonies de Chamois.
Il remplit en outre une évidente fonction de corridor écologique, formant l’une des principales liaisons naturelles entre les massifs subalpins et l’arc jurassien.
L’ensemble présente par ailleurs un grand intérêt paysager (avec par exemple le site du Val de Fier) géomorphologique et biogéographique (stations botaniques en situation marginale, « colonies méridionales » et autres).
Et maintenant régalons-nous avec les photos d’André …
Tout d’abord l’Erythrone Dent de chien, Erythronium dens-canis, que nous avons déjà rencontré dans le Vuache, admirons ses tépales4 roses à rouge violacé à la fois étalés et recourbés et ses anthères bleu violacé. Et ses feuilles vert glauque tachées de brun rougeâtre. Veut-elle se camoufler ? Impossible !
Pourquoi Erythrone ? de erythros signifiant rouge en grec.
Pourquoi dent de chien ? à cause de son bulbe en forme de canine de chien.
« De grâce, ne me cueillez pas, je vais m’étioler dans un vase et mon bulbe ne pourra pas commencer à se reconstituer pour l’an prochain, laissez-moi finir ma vie là où je suis née »
Ensuite, la scille à deux feuilles, Scilla bifolia, toute modeste avec sa grappe de fleurs aux tépales4 d’un bleu unique, quelques fois elles sont blanches mais c’est rare. Regardez bien la terminaison de ses deux feuilles, on dit que ce sont des feuilles « à capuchon », on dit aussi «cucullées » et ce n’est pas un gros mot!
Ces deux fleurs sont des liliacées, ce sont des plantes à bulbes. Grâce aux feuilles et à la photosynthèse5 qui s’y produit, pendant l’été et l’automne, le bulbe se renforce et fait des provisions. Ainsi dès les premiers jours de printemps, grâce à ces réserves, la fleur est prête à éclore.
NB La grande majorité des végétaux se nourrit à la fois, du gaz carbonique de l’atmosphère mais aussi de l’eau et des sels minéraux puisés dans le sol.
Et dans l’étang, près de la ferme du comte ?
Là oui cette fois, il est là le printemps ! Les crapauds communs s’en donnent à cœur joie mais ce sera l’objet d’un autre article !
1- Foug : de Fagus Hêtre
2- Surrection : en géologie, action de surgir, de se soulever.
3- Enrésinement : introduction de résineux dans une forêt de feuillus.
4- Tépale : les six pièces du périanthe (calice + corolle) sont identiques, il est impossible de différencier les sépales (calice) des pétales (corolle) ; on parlera donc de tépales.
5- Photosynthèse : mécanisme qui permet à la plante d’utiliser l’énergie lumineuse pour sa croissance.
Retrouvez la suite des magnifiques photos d’André dans « l’album d’André »
Christianne
Merci à Jean et Joanny pour leur aide.
Sources : www.rhone-alpes.ecologie.gouv.fr
Nature et Patrimoine nos 6 et 8