Une onagracée bien discrète, circée de Paris....
Voici un article de Jean déjà publié mais très interessant en cette saison. Il nous raconte une petite fleur que nous avons rencontrée lundi, au bord du Rhône. On passe souvent sans la voir sauf si on s'interroge sur les minuscules points blancs qui parsèment les herbes encore vertes de ce début d’automne. Je laisse la parole à Jean….
Il est fréquent de voir aux bords des routes, talus, l'espèce éponyme de la famille, Oenothera biennis (onagre bisannuelle) ou, comme dans la photo ci-dessous, Oenothera glazioviana (onagre de Glaziou – probablement échappée d'un jardin)…
Sépales striés de rouge......
Et quatre stigmates du pistil dépassant largement les étamines.
Étymologiquement, il y a de l'âne dans ce nom (onagros), mais aussi du vin (oinos) et la décoction des racines ferait un philtre de sorcière pour amadouer les bêtes sauvages ! Il y a là des sortilèges du dieu Pan.... mais ne nous égarons pas ! Pas de pan......ique !
En revanche, il y a bien de la magie dans cette famille peu étendue, car une plante discrète (pas évidente à repérer la première fois) en fait partie et porte le nom à semer l'effroi de Circaea lutetiana (Circée de Paris, herbe aux sorcières).
Ce nom est celui de la magicienne qui transforma les compagnons d'Ulysse en pourceaux - tout en leur laissant leur conscience d'êtres humains - ! L'ensorceleuse fut néanmoins vaincue, « conquise », par notre héros ; il fut guidé pour ce faire par Hermès (Mercure), « qui lui donna une herbe qui le sauverait des mortels artifices de Circé » .
Qui distingue à première vue, dans ce fouillis de bois humide et de ravin (son milieu habituel), Circaea lutetiana ?
Vue de plus près, on ne s’attend pas à des sortilèges :
Plante pubescente, aux feuilles ovales-lancéolées acuminées*, elle dresse une hampe florale d'une bonne dizaine de cm, avec de fleurs bimères (2S,2P,2E), pétales bifides, blanc ou rosé.
* se terminant en longue pointe éffilée.
à noter les sépales teintés rouge rosé, réfléchis.
Les fruits sont des capsules obovales en poire, hérissés de poils crochus, hispides à deux loges.
Pourquoi Circé ? Pourquoi Lutetiana ? Paris était connu jadis comme la ville des sorcières ? (L'Affaire des poisons date de 1680, où la Voisin fut brûlée en place de Grève – un siècle avant Linné!)
Elle fut utilisée en Autriche, naguère, comme tisane. En usage externe, en macération dans de l'alcool, elle traitait les rhumatismes, la goutte, infections et fièvres (c'est l'alcool qui devait faire effet, la plante qu'un prétexte !...)
Gaston Bonnier aurait écrit..............
plante magique ayant servi dans les enchantements. On dit que celui qui la cueille sera maudit.
qu'elle devrait plutôt porter le nom '' d'herbe des sourciers'', tant elle révélatrice de la présence d'humidité et d'eau en sous-sol.
Mais c'est là faire grand cas de l’appellation vernaculaire et n'explique pas son nom latin.
Alors rêvons un peu, imaginons que c'est elle la plante magique utilisée par Ulysse.......
NB. : les épilobes -espèces plus nombreuses – font partie des onagracées !
La Flora Helvetica dit des onagres, genre venu d'Amérique du Nord :
"Ce genre présente des combinaisons de caractéristiques si nombreuses qu'une taxonomie n'est pas possible" p .682
(photos de l’auteur, d'André, sauf trois emprunts à –Wikipedia)
Jean